Cette passion bureaucratique des dirigeants européens pour la création d'institutions nouvelles se situe tout à l'opposé des conceptions fondatrices de l'Union européenne telles que les imaginait Jean Monnet après la deuxième guerre mondiale. Celui-ci partait du résultat espéré, la paix et la prospérité ; constatant que les diplomates européens en deux siècles n'y étaient jamais parvenus, il eut le génie d'instaurer la paix par le libre commerce. Jean Monnet ne proposait donc des institutions que pour servir un but souhaitable et amorcé à l'avance. Si l'Union européenne est un succès, si elle a atteint très vite, à l'échelon de l'histoire, les buts pour lesquels elle a été créée, c'est en raison de la méthode Monnet.
Devrait-on dépasser l'ambition de départ et, par-delà la paix entre les peuples, par-delà la prospérité par le commerce, passer à un stade supérieur ? Celui-ci ne saurait s'inspirer que d'un modèle, la fédération des Etats-Unis d'Amérique : c'est implicitement la démarche qui sous-tend les pseudo-constitutions et mini-traités qui nous sont soumis. Mais ce projet n'est jamais clairement annoncé ; à aucun moment, qu'il s'agisse de référendum ou de vote parlementaire, il n'est demandé aux peuples de choisir entre deux Europe possibles. La première que je qualifierai d'Europe libérale est fondée sur l'unification du marché intérieur et l'Euro qui en est la garantie à long terme. Cette Europe libérale, parce qu'elle suppose la paix par le libre échange, a vocation à s'ouvrir à d'autres nations comme la Turquie et la Russie , suivant la méthode Jean Monnet , mais par-delà les frontières traditionnelles de la vieille Europe. Cette Europe libérale, implicitement, s'en remet aux Etats-Unis comme gendarmes du monde ; la mondialisation des échanges est possible aujourd'hui grâce à la présence de l'armée américaine, en particulier dans le Pacifique, comme au XIXe siècle la flotte britannique avait permis la première mondialisation. Cette Europe libérale repose donc sur des institutions légères et des armées modestes.
Une autre Europe, que l'on pourrait qualifier d'Europe impériale, est concevable ; elle aurait aussi sa cohérence. Transformée en fédération, dotée d'un pouvoir exécutif fort et centralisé, elle s'engagerait dans une politique de puissance, rivale des Etats-Unis, voire des pôles émergents de l'Asie. Cette Europe impériale suppose une abnégation significative des souverainetés nationales et une augmentation substantielle des budgets militaires. Le Parlement européen et peut-être le pouvoir exécutif devraient être élus sur une base géographique européenne plutôt que nationale. Les peuples en seraient-ils d'accord ? On ne le sait pas puisque la question n'est pas posée dans ces termes. Cette Europe impériale pour rester unie ne pourrait pas étendre ses frontières sauf à dissoudre son identité ; ces frontières seraient fixées mais peut-être conflictuelles.
(Josep Pla)
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dilluns, 23 de juny del 2008
Més sobre l'Europa liberal i l'Europa imperial
Guy Sorman: