
...la mort de Joëlle Aubron pose, d’ailleurs, une autre question, qui sera certainement agitée, dans les jours et semaines à venir, par une partie de l’extrême gauche sinon même de la gauche: est-il juste, voire raisonnable, de maintenir en prison des terroristes (pardon, des « activistes » !) qui y ont déjà passé près de 20 ans et ne présentent « plus de danger» pour la société ? Sur la question du danger, nous serons moins affirmatifs. Certes, il est peu probable que Ménigon ou Rouillan, libérés demain, puissent replonger dans la clandestinité et la lutte armée ». Mais ils peuvent être des exemples –voire des inspirateurs - pour une fraction –infime, certes, mais bien réelle –de la gauche anti-mondialiste qui est susceptible de basculer dans la violence. Surtout en ces temps où certaines luttes « de base » (comme c’est le cas, dans le nord de l’Italie, contre le TGV Lyon-Turin), donnent lieu à des actes de sabotages, donc à une forme de « terrorisme rampant ».
Reste la question du pardon. Notre position est connue. Nous avons toujours pensé que l’État devait être fort –et impitoyable –quand la survie de la démocratie et de l’ordre constitutionnel ou la sécurité des personnes était en danger. Puis vient un temps où il y a de la grandeur à faire preuve de mansuétude. Mais la générosité ne peut s’exercer aux dépens des victimes et de la vérité, et le pardon ne saurait s’appliquer qu’à ceux qui ledemandent. Or, aucun membre d’Action directe n’a jamais demandé pardon ni, même, ne s’est distancié des errements de sa jeunesse. A peine Joëlle Aubron a-t-elle lâché un jour, froidement, « Notre hypothèse a échoué ». C’est peu pour s’excuser de la mort de deux hommes. Alors, autant nous comprenons que Mlle Aubron ait bénéficié d’une libération médicale qui était manifestent justifiée, autant nous estimons que, malheureusement, n’en déplaise à M. Besancenot et à quelques autres, les conditions ne sont pas encore remplies pour libérer les autres membres de ce qu’il faut bien nommer un «gang ».